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HALIFAX GROUPES LOURDS FRANCAIS SQUADRONS 346 et 347 R.A.F
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22 avril 2012

JULES COQUERON "Et le parachute ne s'ouvrit pas"

Récit du Colonel Jules COQUERON

Radio navigant dans l'équipage du Lt PETUS

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Equipage du Lt PETUS

Pilote: Lt PETUS (Cdt d'avion) Navigateur: Lt DESESSARD, Bombardier: Lt MIGNON, Radio: Adjt COQUERON, Mécanicien: Sgt TRIBERT, Mitrailleur-supérieur: Sgt/C LINDEBERG, Mitrailleur-arrière: Adjt RIVIERE.

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J'AI VECU

Et le parachute ne s'ouvrit pas

Certains, dit-on, "ont la baraka ! " Si l'on regarde la succession des "accidents" qui ont émaillé la carrière du colonel de l'armée de l'air en retraite Jules COQUERON, il est certainement un de ceux-là. Après un premier saut en parachute en 1939 pour évacuer son avion en feu, il est deux fois abattu en 1940 alors qu'il sert dans la chasse lourde sur Potez 631, avant de rejoindre les Forces françaises libres au groupe de bombardement "Tunisie". Une nuit de janvier 1945, évacuant son avion en perdition, il fait une chute de 1000 mètres environ et se retrouve au sol sans que son parachute se soit ouvert. Ce saut dramatique nous est raconté ici.

Ajoutons toutefois que la série ne s'arrête pas là. En 1952, le colonel COQUERON est le seul à sortir totalement idemme d'un accident de chemin de fer qui jeta une micheline sur un train de marchandise entre Avignon et Nimes et fit trente-sept morts et de nombreux blessés.

Q - Mon colonel, au cours de votre carrière, vous avez effectué un saut en parachute qui fut pour le moins exceptionnel; pouvez-vous nous en rappeler les circonstances ?.

R - Eh bien. cela s'est passé au-dessus des côtes anglaises dans la nuit du 22 au 23 janvier 1945. A ce moment, je servais en qualité d'adjudant radio navigant au groupe de bombardement "Tunisie", l'un des deux groupes français du Bomber Command au sein de la Royal Air Force et nous étions basés à Elvington près de York. Nos avions étaient des quadrimoteurs Halifax III B, les bombardiers lourds de cette époque qui effectuaient, en particulier, les missions de nuit sur l'Allemagne.

Nous rentrions donc d'un bombardement sur Gelsenkirchen dans la Ruhr et nous avions quelques problèmes. La D.C.A. allemande nous avait mis deux moteurs hors d'usage. Nous avions pu toutefois effectuer notre mission de bombardement et rejoindre la côte anglaise malgré notre handicap. Comme tout paraissait se dérouler normalement, nous avions décidé de rejoindre Elvington plutôt que de nous poser sur un terrain de secours. Nous n'avions pas de blessés à bord et nous savions, par la radio, qu'il n'en était pas de même pour d'autres appareils qui demandaient à se poser d'urgence.

Q - A quelle altitude voliez-vous ?

R - Nous étions approximativement à 7000 pieds, soit environ 2400 mètres, et l'avion volait tout à fait correctement sur ses deux moteurs. De ma place, en-dessous de celle du pilote, j'avais une vue directe sur le moteur intérieur gauche. Tout à coup, j'ai vu des flammes sortir des portes de train. Alerté, le pilote et le mécanicien mirent aussitôt en oeuvre tous les moyens d'extinction. Il s'avéra très rapidement qu'il n'y avait à faire. Le feu redoublait d'intensit", d'intensité, et commençait à envahir la cabine. Devant cette situation, le pilote donna l'ordre d'abandonner l'appareil le plus rapidement possible.

Q - Aviez-vous déjà eu l'occasion de sauter en parachute ?

R - Oui, une fois, au cours d'un précédent accident en 1939, mais je n'avais alors aucune appréhension particulière.

Q - Qu'est-il donc arrivé ?

R - Au moment ou l'ordre d'évacuation fut donné, il y eut une grande explosion à bord immédiatement suivie de la rupture du plan gauche. L'avion se mit à tourner dans tous les sens. Il était 0 h 37 et nous étions à environ 2000 m d'altitude. Je me suis dirigé comme j'ai pu vers la trappe d'évacuation du navigateur, seule issue possible pour moi, Le feu me barrait le chemin de la trappe arrière.

Je ne sais ce qui s'était passé, le navigateur était coincé dans la trappe et ne pouvait plus bouger. Comme j'ai pu, en le secouant et en le bourrant de coups (je lui ai même enfoncé le sternum), j'ai réussi à le dégager. Il est parti en m'entrainant avec lui. En passant la trappe. j'ai probablement dû m'assommer car je ne sais pas comment je suis sorti de l'avion. Je me suis retrouvé en chute libre.

Naturellement mon premier réflexe a été d'essayer d'ouvrir mon parachute. Je voyais la poignée qui me tentait mais malgré tous mes efforts je n'arrivais pas à l'atteindre.

Q- Vous n'arriviez pas à l'atteindre pourquoi ?

R - Je ne l'ai su qu'après, bien sûr. En passant la trappe, je m'étais fracturé la 5e cervicale et j'étais pratiquement paralysé. Cependant. J'avais nettement l'impression que j'avais le temps d'ouvrir. Je ne réalisais pas que j'étais blessé et surtout que j'étais en chute libre.

Q - Et à aucun moment vous n'avez eu l'impression que tout était terminé et que vous alliez vous écraser ?

R - Absolument pas. J'étais persuadé que j'allais ouvrir. Mieux même, j'ai bien cru le faire réellement. Mais cela s'est avéré inexact puisque l'on m'a retrouvé avec le parachute plié dans son sac. Enfin, j'ai touché le sol, mais sans inquiétude aucune, car je n'ai presque rien senti.

Q - Où étiez-vous donc tombé ?

R - Eh bien ! j'étais tombé dans un tas de neige situé au bout d'une allée en ciment dans la cour d'une ferme. Il avait neigé pas mal les jours passés (il y avait environ un mètre de neige sur le sud de l'Angleterre) et le fermier anglais avait balayé la neige et fait un énorme tas à l'extrémité de sa cour. Je suis tombé en plein milieu. Mi conscient mi inconscient, j'ai pu atteindre le sifflet que nous portions tous accroché au revers de notre gilet de vol et tout en me débattant je me suis mis à siffler de toute la force de mes poumons.

Dans les minutes qui ont suivi, le fermier était là. Respectueux des consignes qui, à cette époque, étaient données à la population, il s'était mis sur le pas de sa porte dès qu'il avait entendu l'avion exploser, pour écouter le sifflement éventuel de quelqu'un. Et c'est exactement ce qui s'est produit.

J'ai repris pleinement conscience pendant un instant pour lui demander de faire trois fois la lettre O sur le cadran de son téléphone. C'était  en effet le signal de détresse pour obtenir de suite tous les secours possibles. Une fois son message lancé, aidé de sa femme, le fermier m'a transporté chez lui et déposé devant la cheminée où brûlait un grand feu.

Q - Les secours sont-ils arrivés rapidement ?

R - Oui très vite, car en appelant le numéro de détresse, le fermier avait alerté l'hôpital le plus proche. C'était un hôpital américain spécialisé dans le traitement des grands blessés de la colonne vertébrale qui était en alerte ce jour-là. Cela ne pouvait pas mieux tomber et c'est ce qui m'a sauvé. Le médecin qui est arrivé quelques minutes plus tard était un spécialiste de la colonne vertébrale et disposait de tout ce qu'il fallait dans l'ambulance. Ensuite, tout ce dont je me souviens c'est l'expression du médecin quand il m'a examiné. Pour lui, c'était terminé, il n'y avait pas grand chose à faire.

Transporté à l'hôpital, je suis revenu à moi après dix jours de coma attaché sur une planche. J'y suis resté quarante-sept jours. Ce sont les gens de la R.A.F. qui m'ont raconté comment ils avaient retrouvé mon parachute encore plié dans mon sac.

Q - Alors, lorsque vous avez pleinement réalisé votre aventure, qu'est-ce que vous vous êtes dit ?

R - Je me suis dit "tu as eu de la chance et quelle chance, car non seulement tu as choisi ton tas de neige, mais encore ton médecin et ton hôpital et justement le jour où il était de service".

Q - Avez-vous ressauté en parachute depuis ?

R - Non bien entendu, mais pour ce qui est d'être remonté en avion alors là oui. J'ai été radié du personnel navigant quelque temps après, ce qui est tout de même normal compte tenu de mes blessures.

Q - Vous considérez-vous comme un miraculé ?

R - Miraculé est un bien grand mot. Mais enfin, si l'on veut l'employer, le vrai miracle se situe plutôt dans le fait que je sois tombé à côté d'un hôpital spécialisé et que grâce aux soins qui m'ont été prodigués j'ai pu récupérer presque tous mes mouvements. Bien sûr, aujourd'hui je souffre encore un peu et particulièrement les jours de pluie. Enfin, cela aurait pu être pire n'est-ce pas ?

(Propos recueillis par le commandant (air) Claude LEGRAND)

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Commentaires
B
j'ai eu beaucoup de plaisir à lire ce récit, dont je connaissais les grandes lignes.<br /> <br /> le souvenir de votre père est toujours présent dans ma mémoire,<br /> <br /> il travaillait comme auxiliaire de la justice, après sa retraite, lorsque j'étais moi-même juge à Nimes et j'avais une grande estime pour lui et je peux même dire une grande amitié même si je ne l'ai jamais exprimée.<br /> <br /> j'ai quitté Nimes en 1982 et ne l'ai jamais revu.<br /> <br /> je me doutais qu'il avait dû disparaître mais je ne passe jamais à Saint Gilles sans penser à lui.<br /> <br /> Je souhaite pour vous q'il ait été aussi bon père qu'il était un bon professionnel, chaleureux, humain, rigoureux, positif....
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C
Oui c'était mon pére ! Basé à Elvington , a été décoré de la D.F.C. et pas à titre posthume!
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J
Il est certain que pour beaucoup de personnes non averties de l'histoire des forces aériennes françaises pendant la 2 ème GM tout groupe ou aviateur présent en Angleterre pendant la pèriode 1943-1945 était des Forces Aériennes Françaises Libres. En plus comme ce fut le cas pour les groupes lourds si les avions étaient frappés d'une croix de Lorraine...Pour la petite histoire les lettres écrites par André Esquilat du groupe Guyenne d'Elvington en 1945 étaient écrites sur du papier à lettres à en tête FAFL...
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H
Chers amis,<br /> <br /> <br /> <br /> le groupe de bombardement Tunisie,comme le Guyenne,n'était pas une unité des Forces Aériennes Françaises Libres.D'ailleurs les F.A.F.L. avaient disparues au profit des Forces <br /> <br /> Aériennes Françaises en Grande-Bretagne depuis le 3 AOUT 1943. <br /> <br /> En Angleterre se trouvaient:<br /> <br /> -4 escadrilles de chasse:<br /> <br /> Alsace et Ile de France des ex.F.A.F.L.<br /> <br /> Les Cigones et le Berry des Forces Aérinnes d'A.F.N. <br /> <br /> <br /> <br /> -1 escadrille de bombardement moyen: Lorraine des ex.F.A.F.L. <br /> <br /> <br /> <br /> -2 escadrilles de bombardement lourd: Le GUYENNE<br /> <br /> et le Tunisie des Forces Aériennes d'A.F.N.<br /> <br /> <br /> <br /> L'ensemble de ces forces fut réuni sous le titre<br /> <br /> des F.A.F.G.B. ET SOUS COMMANDEMENT OPERATIONNEL<br /> <br /> DE LA R.A.F..
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